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Le partenariat d'innovation, mesure phare des nouvelles directives "marchés publics"

JANVIER 2015

En instaurant le partenariat d’innovation, le décret n°2014-1097 du 26 septembre 2014 portant mesures de simplification applicables aux marchés publics a pour objectif de faciliter la passation de marchés publics à visée innovante et d’aider les acheteurs publics à faire une meilleure utilisation stratégique de leurs marchés. Il permet de dépasser une contrainte de l’actuel Code des Marchés Publics : l’impossibilité de garantir à un opérateur qui aurait investi dans le développement d’une solution innovante qu’il remportera le marché d’acquisition de ladite solution.

L’acheteur public pourra désormais, par une procédure unique, participer à un projet de Recherche et Développement (R&D) avec un opérateur, puis acquérir les résultats de cette prestation sans qu’il soit nécessaire de procéder à une nouvelle mise en concurrence. La prise de risque de l’opérateur économique est donc réduite à la question de l’atteinte des objectifs dans la phase de R&D.

1. Une condition essentielle : faire émerger une solution inexistante

L’acheteur public peut recourir au partenariat d’innovation lorsqu’il n’existe pas sur le marché de solution pouvant satisfaire son besoin afin de faire émerger un dispositif neuf. Cette condition le différencie du dialogue compétitif pour lequel l’acheteur ne peut identifier seul les solutions existant sur le marché.

Sont innovants, au sens du code, les fournitures, services ou travaux nouveaux ou sensiblement améliorés qui répondent à un besoin qui ne peut être satisfait par des fournitures, services ou travaux déjà disponibles sur le marché.

Le Guide de bonne pratique en matière de marchés publics[1], mis à jour le 3 octobre 2014, précise « qu’avant de se lancer dans un partenariat d’innovation, les acheteurs publics doivent donc avoir une connaissance du marché et des opérateurs économiques afin de déterminer si les prestations peuvent être considérées comme déjà disponibles et quel supplément d’innovation ils attendent du partenariat envisagé ».

La démonstration du caractère innovant est donc un préalable nécessaire pour recourir à ce nouveau contrat. Ce travail amont supplémentaire pourra offrir une sécurité importante aux acheteurs et leur permettra d’anticiper la rédaction d’un contrat relativement complexe (clause relative à la durée, stipulations financières et indemnisations des entreprises qui ne poursuivraient pas la procédure, partage des droits de propriété intellectuelle, etc.).

2. Une procédure souple et adaptée aux spécificités de l’activité R&D

L’acheteur aura recours à la procédure négociée avec publicité et mise en concurrence, quel que soit le montant du marché, sous réserves de quelques aménagements imposés par les directives européennes :

  •  en raison du temps nécessaire à la R&D, il ne peut pas y avoir de réduction des délais de procédure du fait de l’urgence ;
  •  la sélection des candidatures doit être opérée sur la base de critères de capacité des candidats dans le domaine de la R&D ainsi que dans l’élaboration et la mise en œuvre de solutions innovantes ;
  •  la négociation peut porter sur tous les aspects de l’offre, à l’exception des exigences minimales et des critères d’attribution. L’objet du contrat, ses caractéristiques et modalités d’exécution peuvent ainsi évoluer au cours des négociations.

Compte tenu de la spécificité du partenariat d’innovation qui comporte une phase de R&D, certaines mentions qui en principe sont obligatoires dès la signature du contrat peuvent être précisées ultérieurement :

  • le prix ou ses modalités de détermination,
  •  la durée du marché ou les dates prévisionnelles de début d’exécution et d’achèvement
  •  les conditions de réception, de livraison ou d’admission des prestations,
  • les conditions de règlement,
  •  les éléments propres aux marchés à tranches conditionnelles.

Le décret prévoit que ces mentions seront alors précisées, pour chacune des phases du partenariat, au plus tard avant le commencement d’exécution des prestations de la phase, au regard des résultats de la phase précédente.

3. Une structure contractuelle originale

L’originalité du partenariat d’innovation réside dans sa structuration et dans la faculté de multi-attribution, auxquelles ont été adossées plusieurs garde-fous :

  • La particularité de ce nouveau marché tient à sa structuration par phase : une première consacrée au processus de R&D et une seconde, à l’acquisition des produits, services ou travaux qui en sont le résultat. La phase de R&D est organisée en plusieurs étapes auxquelles correspondent des objectifs intermédiaires. Ces étapes doivent permettre des ajustements voire la fin du partenariat.

  • Le partenariat doit prévoir la durée et la valeur de ses différentes phases en tenant compte du degré d’innovation de la solution proposée et du déroulement des activités de R&D requises pour le développement d’une solution innovante. « Cette règle assure que le partenariat d’innovation ne sera pas utilisé pour échapper aux règles normales d’utilisation des autres procédures. Ainsi, un partenariat d’innovation qui nécessiterait une phase de R&D très courte et peu coûteuse ne peut prévoir, au titre de l’option d’achat, une acquisition pour un prix très élevé ou pour des quantités très importantes, même sur une durée réduite » prévient la Direction des Affaires Juridiques de Bercy.

  • L’originalité du partenariat d’innovation réside aussi dans la possibilité d’exécuter le marché avec un ou plusieurs titulaires qui exécutent les prestations de manière séparée dans le cadre de contrats individuels. À cette multi-attribution, le décret associe la faculté de réduire le nombre de partenaires en cours d’exécution.

  • Les conditions et conséquences juridiques de la mise en œuvre de ces possibilités – ajustement du partenariat, réduction du nombre de partenaires, fin du partenariat

  • doivent être précisées dans le contrat ainsi que la répartition des droits de propriété intellectuelle. Une limitation des cas de transferts de propriété intellectuelle pourrait rassurer certaines entreprises candidates.

  • Le partenariat doit aussi respecter le secret industriel et commercial. L’acheteur public ne pourra donc révéler les solutions proposées ou les informations confidentielles communiquées par un partenaire sans l’accord de celui-ci.

  • Enfin, il est important de préciser que l’acquisition des solutions innovantes n’est qu’une simple option pour l’acheteur public. En effet, la phase d’acquisition ne peut être mise en œuvre que si le résultat correspond aux niveaux de performance et aux coûts maximum convenus. Mais l’acheteur public peut également prévoir dans le contrat, que si, pendant l’exécution, une solution nouvelle susceptible de répondre à ses besoins apparait sur le marché, moins chère ou de meilleure qualité, il ne passera pas à la phase d’acquisition. Cette situation pourrait ainsi conduire à un surenchérissement des phases de recherche par les candidats.

Le partenariat d’innovation est sans conteste une procédure intéressante pour mettre en valeur le savoir-faire des entreprises et promouvoir l’innovation. Mais les acheteurs vont devoir tout d’abord s’approprier ce nouvel outil qui reste « complexe » et le sécuriser afin d’inciter les PME innovantes à répondre aux projets publics.

 


[1]  http://www.economie.gouv.fr/files/files/directions_services/daj/marches_publics/conseil_acheteurs/guides/guide-bonnes-pratiques-mp.pdf

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